Par Pierre Famery, d’Elcimaï Environnement
Quel avenir pour le réchauffement climatique ?
Le réchauffement climatique est d’ores et déjà une réalité dans notre pays. Selon Météo France, la température moyenne annuelle depuis 1990 est systématiquement au-dessus de la moyenne observée sur la période 1961-1990. 2022 a été l’année la plus chaude en France depuis le début du 20ème siècle et 2023 se classe en second avec +1.4°C par rapport aux normales des 3 décennies précédentes.
La situation est similaire dans le reste du monde et l’objectif de l’Accord de Paris de maintenir l’augmentation moyenne de la planète aussi proche que possible de +1.5°C par rapport aux niveaux préindustriels, est clairement en passe d’être un échec.
Comment faire face au réchauffement climatique ?
Sur nos territoires, les difficultés se multiplient. Au-delà des conditions extérieures, les usages des bâtiments (locaux d’enseignement, hôpitaux, logements) sont perturbés. Il faut donc pouvoir répondre très concrètement aux questions suivantes : comment faire face à cette situation et permettre un niveau de confort d’été acceptable par les usagers ? Dans quelle mesure cela aura-t-il ou non un impact supplémentaire sur l’environnement ?
Jusqu’à présent, certaines solutions passives ont été plébiscitées pour écarter celle de la climatisation: amélioration du bâti, conception bio-climatique, évolution réglementaire, etc. Et pourtant, combien de modèles de simulation thermique utilisés en conception se sont retrouvés erronés face à l’usage réel du bâtiment et au vécu de ses occupants ? Combien de maîtres d’ouvrage ont eu à gérer des insatisfactions de leur personnel ou des usagers en raison d’un inconfort d’été manifeste ?
La question n’est pas de refuser ou de freiner la production active de frigorie mais de conduire des réflexions pour proposer des dispositifs mixtes décarbonés, innovants et durables, s’inscrivant dans une gestion responsable.
Le confort d’été désigne la capacité d’un bâti à maintenir une température qui ne soit pas pénible lors des fortes chaleurs. La RE2020, entrée en vigueur au 1er janvier 2022, a fait émerger des indicateurs comme les degrés heure d’inconfort, lorsque la température intérieure dépasse les 26 ou les 28°C selon les conditions.
Énergivore, voire polluante, la climatisation fixe électrique (pompes à chaleur réversibles ou groupes d’eau glacée), longtemps favorite, n’apparait plus comme le seul et le meilleur des recours, et les solutions de rafraichissement passives, telles que la végétalisation, la ventilation naturelle ou les brise-soleil, sont certes vertueuses mais également insuffisantes.
Il s’agit désormais d’offrir davantage et d’encourager un ensemble de dispositifs, prenant en compte tant l’environnement naturel ― la proximité de la mer ou la présence d’une nappe phréatique, les vents thermiques en journée et nuit, les effets d’ilots urbains… ―, que la configuration et l’utilisation du bâti, et ce dès sa conception. Créer des ilots de fraicheur en aménagements extérieurs comme des travées vertes et des tonnelles, veiller à l’orientation du bâtiment vis à vis du soleil et des vents, rendre possible les ventilations traversantes de nuit, étudier rigoureusement les choix relatifs aux enveloppes (épaisseur et hauteur des parois, nombre et nature des ouvertures, inertie des planchers et cloisons intérieures), fragmenter l’organisation des espaces selon leur usage (nombre d’occupants, présence ou non de bureautique, niveau d’activité…), consisteront autant d’actions qui, conjuguées, participeront à l’obtention du confort en été.
Mais il faut aussi compléter ce panel, et c’est là le rôle des sociétés d’ingénierie. Associer solutions passives et technologies actives efficaces apparait comme la piste à privilégier et à développer.
Nouvelles technologies : la thalassothermie et l’aquathermie
Parmi ces technologies, la thalassothermie et l’aquathermie présentent un potentiel sous-estimé. La géothermie par sonde permet elle aussi d’extraire la chaleur d’un bâtiment en été, de la stocker dans le sol et de la restituer en hiver. Ces solutions offrent la possibilité de rafraichir un ou plusieurs bâtiments, voire l’ensemble d’un quartier, grâce à une boucle d’eau froide. Est-il utile de rappeler l’efficience énergétique d’une condensation à eau par rapport à la condensation à air pour une machine thermodynamique ? Nos 20 000 kilomètres de littoral, nos mers, lacs, nappes et rivières en grand nombre sur notre territoire (représentant 80 milliards de m3 de ruissellements et crues chaque année pour la France métropolitaine selon le Réseau national des données sur l’eau) autorisent de multiples innovations en matière de rafraichissement, sachant que les puisages et rejets ou autres impacts sur la biodiversité sont étroitement règlementés pour maitriser les conséquences environnementales. Ainsi dans une ville traversée par un cours d’eau, il est possible de mettre en place un réseau de froid urbain, une solution peu énergivore et durable. C’est le cas de Paris dont le réseau de froid fonctionne avec la Seine.
Pour reprendre un vieux slogan, en France on n’a pas de pétrole mais on a des idées… et de l’eau. Soyons innovants : développons les réseaux de froid à l’échelle du quartier pour améliorer le confort estival.
Publié le
22/11/2024
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